Un rĂȘve de statue qui tourne au cauchemar pour RaphaĂ«l Glucksmann
Leçon dâhumilitĂ© venue dâoutre-Atlantique
Il y a des jours oĂč lâon ferait mieux de rester coi, de laisser les mots dans leur Ă©crin et les idĂ©es dans leur brouillard.
Raphaël Glucksmann (Place publique (PP), parti politique français écologiste et proeuropéen), cet éternel romantique de la politique française, a cru bon de jouer les esprits libres en lançant, le 16 mars 2025, une petite saillie lors du congrÚs de Place Publique.
Rendez-nous la Statue de la Liberté !
a-t-il clamĂ©, sourire en coin, comme si cette boutade allait faire trembler les fondations de lâAmĂ©rique trumpiste.
Une critique voilĂ©e, un clin dâĆil philosophique Ă la libertĂ© bafouĂ©e, dira-t-on dans son camp.
Mais voilĂ , lâironie a ses limites, et la Maison Blanche, sous la fĂ©rule de Donald Trump, nâa pas goĂ»tĂ© la plaisanterie.
«Rendez-nous la statue de la Liberté !» : la demande de Raphael Glucksmann aux Américains pic.twitter.com/B6p1WHIG6w
— LCI (@LCI) March 17, 2025
Un écho brutal depuis Washington
Le lendemain, Karoline Leavitt, porte-parole de lâadministration amĂ©ricaine, a dĂ©gainĂ© une rĂ©plique qui a claquĂ© comme un fouet sur lâego du dĂ©putĂ© europĂ©en.
On conseille Ă ce mauvais politicien inconnu de se rappeler que câest grĂące aux Ătats-Unis que les Français ne parlent pas allemand.
a-t-elle assĂ©nĂ©, sans mĂȘme daigner citer son nom.
Un uppercut verbal, précis, qui renvoie Glucksmann à son anonymat relatif sur la scÚne mondiale.
Car oui, RaphaĂ«l, si ton verbe rĂ©sonne dans les cĂ©nacles parisiens, il semble nâĂȘtre quâun murmure inaudible au-delĂ de lâAtlantique.
La leçon est rude : vouloir titiller lâOncle Sam sans mesurer la portĂ©e de ses mots, câest sâexposer Ă une gifle diplomatique dĂ©guisĂ©e en leçon dâhistoire.
#TPMP « L’Ă©quipe #Trump dit que sans les AmĂ©ricains, la France parlerait allemand ? C’est faux ! Ce sont les Russes qui ont vaincu les nazis. L’ArmĂ©e rouge a pris Berlin, l’ArmĂ©e rouge a eu les plus lourdes pertes, et Stalingrad ce n’Ă©tait pas les AmĂ©ricains. » @Cyrilhanouna @tpmp pic.twitter.com/fGp1imv4uj
â Thomas GuĂ©nolĂ© (@thomas_guenole) March 18, 2025
La légÚreté qui se mue en ridicule
On pourrait saluer lâaudace, louer cette tentative de faire de la politique un théùtre dâidĂ©es.
Mais ici, le rideau tombe trop vite. Glucksmann, en jouant les Don Quichotte face à la statue offerte en 1886, a oublié que les moulins à vent trumpistes ne pardonnent pas les provocations maladroites.
Son parti a beau parler de « boutade » et railler le manque dâhumour des « trumpistes », le mal est fait.
Lâimage reste : celle dâun homme qui, en voulant briller, sâest pris les pieds dans le tapis de sa propre rhĂ©torique.
Car, soyons sĂ©rieux, demander le retour de la Statue de la LibertĂ©, mĂȘme sur le ton de la plaisanterie, câest tendre une perche immense pour se faire ridiculiser.
Une morale en creux
Il y a dans cette mĂ©saventure une leçon qui flotte, discrĂšte mais implacable. La politique, cet art de la mesure et de lâĂ©quilibre, ne souffre pas les Ă©lans mal calibrĂ©s.
Glucksmann, en quĂȘte dâun Ă©clat symbolique, nâa rĂ©coltĂ© quâun Ă©clat de rire â pas le sien, hĂ©las.
LâAmĂ©rique lui a rappelĂ©, avec une pointe de cruautĂ© dĂ©licieuse, que les grands gestes nĂ©cessitent une stature Ă leur hauteur.
Et pendant ce temps, sur les rĂ©seaux, les moqueurs sâen donnent Ă cĆur joie, transformant cette saillie en mĂšme, en farce, en miroir dâune ambition qui sâest vue un instant trop grande pour son costume.
Ainsi va la scĂšne internationale : on y entre avec panache, mais on en sort parfois par la petite porte, sous les rires Ă©touffĂ©s dâune salle qui ne pardonne rien.