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Une femme en fauteuil roulant sur la RN12 : l’absurde au bord de l’abîme

Le 13 mars 2025, Brest s’est réveillée avec une histoire qui semble tout droit sortie d’un roman de Kafka revu par David Lynch.
Une femme, septuagénaire, en fauteuil roulant électrique, s’est retrouvée à déambuler sur la bretelle de la porte de Gouesnou, là où la RN12, cette artère rugissante limitée à 90 km/h, avale les vies pressées et recrache des destinées.

À 10h du matin, sous un ciel breton probablement gris – parce que c’est Brest, après tout –, elle avançait à 10 km/h, frêle silhouette mécanique défiant l’asphalte et les bolides.
Absurde ? Oui. Réel ? Plus que jamais.

La mécanique de l’impossible

Imaginez la scène : des SUV aux chromes rutilants, des camions aux klaxons graves, et au milieu, elle.
Une vieille dame, perdue, son fauteuil ronronnant comme une protestation silencieuse contre la vitesse, contre le monde qui file sans regarder.

Comment est-elle arrivée là ? On ne sait pas encore.
Une erreur de parcours, un GPS mental en panne, une fugue désespérée ?
Les hypothèses dansent, mais les faits restent : elle était là, fragile et têtue, sur une voie où personne ne devrait être à pied, encore moins sur roues motorisées à l’allure d’un escargot.

Les anges de la route

Et puis, il y a eu eux. Les anonymes, les conducteurs lambda, ceux qu’on maudit d’habitude pour un clignotant oublié ou un excès de zèle au feu rouge.
Ce jour-là, ils ont arrêté leurs machines, descendu leurs vitres, formé un bouclier humain autour de cette intruse vulnérable.

Un type a couru, oui, couru derrière elle, comme dans un film d’action low-budget, pour la guider vers la bande d’arrêt d’urgence.
Pas de super-héros en cape, juste des gens ordinaires qui ont vu l’humanité avant le Code de la route.

La vidéo, devenue virale, montre ça : une solidarité brute, instinctive, presque belle dans son chaos.

Ouest France
Une personne en fauteuil roulant s’engage sur une quatre-voies en Bretagne. Grâce à plusieurs automobilistes, elle n’est pas blessée.
1 question :
pourquoi celle qui filme ne l’a t-elle pas arrêter avant sur la bretelle ?? pic.twitter.com/fqzabdAXlS

— Cléopatre✌ (@Cleopatre21s) March 16, 2025

Le choc, la survie, la question

Quand les pompiers et la police sont arrivés, elle était déjà hors de danger.
Choquée, disent-ils. Paniquée, mais vivante. Pas une égratignure sur elle ni sur son fauteuil, ce petit tank improbable qui a tenu tête à la RN12.
Mais au-delà du sauvetage, il reste le vertige des « pourquoi ». Pourquoi elle ? Pourquoi là ?

Et surtout, pourquoi notre société laisse-t-elle une femme de 70 ans, en fauteuil roulant, se perdre au point de frôler la mort sur une voie express ?
On célèbre les héros du jour, mais on oublie vite ceux qui tombent dans les interstices d’un monde trop rapide, trop indifférent.

Une fable moderne

Cette histoire, c’est un miroir. Elle nous renvoie l’image d’une époque où la technologie promet de tout connecter, mais où une vieille dame peut finir seule sur une autoroute, entourée de métal hurlant.
C’est aussi une leçon : parfois, l’humanité surgit là où on l’attend le moins, dans les klaxons et les freins qui sifflent.

Brest, ce 13 mars, a été le théâtre d’un miracle ordinaire.
Mais demain ? Qui sauvera la prochaine silhouette égarée ? Et qui, au fond, est vraiment perdu : elle, ou nous tous ?