Après le coup porté à C8, l’ARCOM peut-il faire tomber CNews dans 10 ans ?

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Le couperet est tombé. C8, la chaîne qui a fait de Cyril Hanouna une figure incontournable du PAF, a été éjectée de la TNT par l’ARCOM, ce gendarme de l’audiovisuel qui décide qui a le droit de parler et qui doit se taire.
Le 28 février 2025, les écrans hertziens de la chaîne s’éteindront, laissant derrière eux un sillage de polémiques, d’amendes records (plus de 7 millions d’euros) et une question brûlante : CNews, l’autre enfant terrible du groupe Bolloré, sera-t-elle la prochaine sur la liste ?

Si l’ARCOM a osé trancher dans le vif avec C8, rien ne semble empêcher cette autorité de s’attaquer à la chaîne d’info qui fait trembler les plateaux par sa ligne éditoriale sans compromis.

Un précédent qui fait trembler

C8 n’a pas été supprimée pour rien.
Les dérapages à répétition de « Touche pas à mon poste », les sanctions financières qui s’accumulent comme des trophées maudits, et un mépris apparent des obligations légales ont fini par sceller son sort.
L’ARCOM a jugé que la chaîne ne méritait plus sa place sur les fréquences publiques, un privilège rare et convoité.
Mais ce qui frappe, c’est la brutalité du geste : priver une chaîne de sa diffusion TNT, c’est une première dans l’histoire récente.

Et ça change tout. Si l’ARCOM a pu faire plier C8, pourquoi s’arrêterait-elle là ?
CNews, avec ses 17 sanctions depuis 2012 et une accélération folle en 2024 (8 rien que cette année), offre un profil tout aussi explosif.

Entre climatoscepticisme assumé, débats orientés et accusations de propagande d’extrême droite, la chaîne d’information joue avec le feu des conventions qu’elle a signées.

CNews, une cible trop rentable pour tomber ?

Pourtant, CNews a des cartes que C8 n’avait pas.
Déjà, elle cartonne : première chaîne info en audience devant BFMTV en 2024, elle est devenue rentable là où C8 accumulait les pertes (48,5 millions d’euros en 2023).
Ensuite, elle a su se réinventer après des années de rappels à l’ordre, promettant un semblant de pluralisme pour calmer les ardeurs de l’ARCOM.

Mais ces engagements tiennent-ils vraiment ?
Les amendes pleuvent encore – 150 000 euros en novembre 2024 pour des manquements au pluralisme et à l’honnêteté de l’information.
L’ARCOM, sous pression du Conseil d’État depuis février 2024, doit durcir son contrôle sur la diversité des opinions.
CNews, avec ses chroniqueurs engagés et sa ligne ultra-conservatrice, reste dans le viseur.

Une guerre politique déguisée

Derrière les décisions de l’ARCOM, ça sent la poudre politique.
Les soutiens de CNews crient à la censure, accusant un régulateur aux ordres d’un pouvoir macroniste qui voudrait museler les voix dissidentes.

Les détracteurs, eux, applaudissent, voyant dans ces sanctions une tentative désespérée de sauver un débat public noyé sous la désinformation.
Mais l’ARCOM est-elle vraiment indépendante ?
Son président, Roch-Olivier Maistre, nommé sous Macron, finit son mandat en février 2025.
Son successeur pourrait changer la donne, ou au contraire accentuer la traque contre les chaînes Bolloré.

Si CNews tombe, ce sera moins une question de droit qu’un bras de fer entre idéologies.

Quand aura lieu la prochaine attribution des fréquences TNT ?

En France, l’ARCOM, ce grand manitou de l’audiovisuel qui régente nos écrans, distribue les sésames de la TNT comme on jette des os à des chiens affamés.
Dix ans, voilà le pactole initial qu’une chaîne peut décrocher pour squatter les ondes hertziennes, un joli cadeau gravé dans la loi de 86, celle qui prétend défendre la « liberté de communication ».
Dix ans, ça vous pose une éternité cathodique, mais attention, il y a un bonus : si t’es sage, si tu files droit et que tu ne fais pas trop tanguer le bateau du pluralisme officiel, l’ARCOM te gratifie d’un rab de cinq piges, sans même un appel d’offres pour faire semblant de jouer la concurrence.
Total : quinze ans à tenir le crachoir avant que quelqu’un ne vienne vérifier si t’as pas trop déconné.
Quinze ans, c’est le bail maxi avant que les fréquences ne soient remises sur le tapis, comme en 2025, où ça va valser sec pour certaines têtes de gondole.
Tout ça, c’est le grand théâtre d’une régulation qui se veut garante de la diversité des voix, du respect des règles et d’un semblant de création culturelle – sauf que dans les faits, c’est souvent un permis de diffuser pour ceux qui savent caresser le système dans le sens du poil. L’ARCOM veille, qu’ils disent, mais on sait bien que derrière les beaux discours, c’est une guerre de tranchées entre intérêts privés et façades publiques.

Quelles chaînes vont remplacer NRJ12 et C8 à partir de février 2025 ?

La disparition de C8 et NRJ12 de la TNT dès le 28 février 2025 laisse place à deux nouvelles venues : RéelsTV et OFTV. RéelsTV, portée par le groupe CMI France de Daniel Kretinsky, prendra le canal de C8 dès le 1er mars 2025, promettant une grille axée sur les documentaires, les débats et une vision « réaliste » du monde. OFTV, soutenue par le groupe Ouest-France, remplacera NRJ12, mais pas avant le 1er septembre 2025, en raison de délais de préparation – ce qui signifiera six mois d’écran noir sur ce canal. Basée à Rennes, OFTV mise sur une identité régionale et une offre généraliste ancrée dans la « vraie vie ».

Ces choix reflètent la volonté de l’ARCOM de diversifier le paysage audiovisuel.

Et après ?

L’ARCOM a les armes pour fermer CNews : un arsenal de sanctions, le pouvoir de ne pas renouveler sa fréquence en cas de récidive grave, et une opinion publique divisée qui ne freinera pas forcément le coup fatal.

Mais Bolloré n’est pas du genre à lâcher prise. Si CNews perd la TNT, elle pourrait migrer sur le web, les box, ou même une autre chaîne du groupe Canal+.
Reste que perdre cette vitrine hertzienne serait un symbole fort, une claque au modèle médiatique qu’elle incarne.

Alors, après C8, CNews tremble. Et nous, on regarde, fascinés, ce feuilleton où la télé devient un champ de bataille.

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