🧠Quand ton cerveau n’a pas de voix : l’anendophasie de ces esprits silencieux décryptée
Anendophasie ?
Imagine un monde où ton cerveau ne te parle pas.
Pas de petite voix qui te guide, te critique ou te pousse à avancer.
Rien. Juste un silence intérieur, et pourtant, tu penses, tu ressens, tu vis.
C’est ce que traverse Mel May, une vidéaste new-yorkaise dans la trentaine, qui a découvert qu’elle était une anomalie.
Je n’ai pas de voix dans ma tête
a-t-elle réalisé un jour, après avoir lu un article sur ce monologue intérieur qu’on croit tous avoir.
Elle a d’abord cru à une blague, puis a vu l’incrédulité dans les yeux de ses proches.
Des psychologues ont fini par confirmer : elle fait partie des rares personnes touchées par l’anendophasie, un phénomène où la pensée se passe de mots intérieurs.
Et si ce silence mental était la clé pour comprendre comment on fonctionne vraiment ?
Anendophasie : un nom pour un mystère
Ce n’est que récemment que des chercheurs ont mis un mot sur cette réalité déroutante. En 2023, une étude publiée dans la revue Psychological Science a baptisé ce phénomène : l’anendophasie. Une condition qui semble défier l’imagination, mais qui ouvre une fenêtre fascinante sur la manière dont nos esprits s’organisent. Parce que, soyons honnêtes, qui n’a jamais entendu cette petite voix qui commente, planifie ou ressasse ? Eh bien, pour certains, elle n’existe tout simplement pas. Et ça change tout.
La pensée sans mots : un casse-tête pour la science
Étudier ce qui se passe dans nos têtes, c’est comme essayer de cartographier un océan en pleine tempête.
Les gens ne se rendent pas compte des caractéristiques de leur expérience intérieure
explique Russell Hurlburt, professeur de psychologie à l’université de Nevada, qui a plongé dans les méandres de nos processus mentaux.
Dans une de ses expériences, il a demandé à des sujets de lire La Métamorphose de Kafka, avant de les interrompre pour qu’ils décrivent ce qui se passait dans leur esprit.
Surprise : pour certains, pas de mots, mais des images, comme un film personnel qui remplace le texte.
D’autres, comme Mel May, n’ont ni mots ni images. Juste… autre chose.
Hurlburt estime que, même pour ceux qui ont une voix intérieure, elle n’est active qu’environ 20 à 25 % du temps. Un chiffre qui varie énormément d’une personne à l’autre, et qui montre à quel point nos cerveaux sont des univers uniques.
Quand les certitudes s’effondrent
Ces découvertes ont secoué même les experts.
Hélène Loevenbruck, chercheuse française spécialiste du monologue intérieur, a dû revoir ses convictions.
Il y a encore peu de temps, je pensais que tout le monde avait une voix intérieure
confie-t-elle. Elle voyait ce monologue comme une simulation mentale, un brouillon pour transformer nos pensées en paroles.
Mais l’anendophasie et d’autres phénomènes, comme l’aphantasie (l’absence d’images mentales), prouvent que nos esprits ne suivent pas tous les mêmes règles.
Vivre sans voix : un avantage ou un frein ?
Alors, qu’est-ce que ça change de ne pas avoir de voix intérieure ?
Daniel Gregory, philosophe à l’université de Barcelone, avance une piste : ce monologue peut nous rendre vulnérables à des pensées négatives, à des spirales de rumination.
Mais il peut aussi être un outil pour se motiver, se parler gentiment, se pousser à avancer.
Mel May, elle, voit les deux côtés de la médaille. Elle dit ressentir peu d’angoisses face à l’avenir, mais galère à se remémorer des souvenirs précis.
Je pense qu’il y a du pour et du contre
résume-t-elle, avant d’ajouter, avec une pointe de défi :
Je ne suis pas vide à l’intérieur : je sais et je ressens des choses.
et toi, comment tu penses ?
L’anendophasie nous force à nous interroger : et si la façon dont on pense n’était pas si universelle ?
Quand Mel May parle, elle dit simplement :
Je vous écoute et je réponds automatiquement.
Pour elle, c’est naturel. Mais pour ceux qui vivent avec une voix intérieure, ça semble presque inconcevable.
Ce phénomène, aussi rare soit-il, nous rappelle une vérité essentielle : nos esprits sont des territoires sauvages, pleins de mystères qu’on commence à peine à explorer.
Alors, la prochaine fois que tu entendras ta petite voix, demande-toi : et si elle n’était pas là, qui serais-tu ?