Quand la campagne murmure ses mystĂšres
Des esprits nés de la terre et du vent
Dans les creux du Poitou, lĂ oĂč les champs sâĂ©tendent comme des pages dâun vieux grimoire, on parle encore des fadets.
Pas de nĂ©ons, pas de chichis : ces petits ĂȘtres, mi-lutins, mi-fantĂŽmes, sont les gardiens discrets dâun paranormal rural, celui qui sent lâhumus et la pluie dâautomne.
Les fadets, câest pas Hollywood, câest pas des monstres Ă effets spĂ©ciaux.
Ce sont des silhouettes furtives, des rires dans le brouillard, des Ăąmes lĂ©gĂšres qui dansent entre les croyances dâautrefois et les silences dâaujourdâhui.
On dit quâils viennent des vieilles lĂ©gendes celtiques, mĂȘlĂ©es aux superstitions chrĂ©tiennes, un cocktail dâimaginaire oĂč lâhomme cherchait Ă donner un nom aux frissons de la nuit.
Fadets ou farfadets : une histoire de famille
Et lĂ , tu te demandes : fadets, farfadets, câest quoi la diffĂ©rence ?
Eh bien, câest subtil, comme un jeu dâombres.
Le fadet, câest le mĂŽme du coin, le Poitevin pure souche, un mot qui fleure le patois et les rĂ©cits au coin du feu.
Le farfadet, lui, câest le grand frĂšre qui a fait carriĂšre, popularisĂ© par les livres et les contes dâun peu partout en France.
Ătymologiquement, « farfadet » vient du provençal, une racine qui Ă©voque les papillons et les esprits volages, tandis que « fadet » serait une dĂ©clinaison locale, plus rude, plus ancrĂ©e.
On les confond parce quâils sont cousins : tous les deux taquins, capables de cacher tes outils ou dâaider Ă la moisson si tu leur laisses un bout de pain.
Mais le fadet, lui, garde un cĂŽtĂ© brut, presque oubliĂ©, comme un secret quâon chuchote encore dans les villages.
Ce quâils sont, ce quâils font
Les fadets, on les imagine petits, vifs, invisibles sauf pour ceux qui savent voir.
Ils squattent les moulins abandonnĂ©s, les chemins perdus, les mares oĂč la lune se reflĂšte.
Malins, ils aiment te faire tourner en rond, te perdre dans les bois, mais si tâes malin aussi, ils peuvent te filer un coup de main.
On raconte quâils protĂšgent la terre, quâils vengent les paysans qui la respectent.
Une vieille croyance dit quâun fadet en colĂšre peut gĂącher ta rĂ©colte, mais quâun fadet flattĂ© te ramĂšne une piĂšce dâor trouvĂ©e dans la boue.
Câest pas des dĂ©mons, câest pas des saints : câest lâĂ©quilibre fragile entre lâhomme et lâinconnu.
Une anecdote qui résonne encore
En 1892, dans un hameau prÚs de Parthenay, une histoire a circulé.
Un fermier, un certain Pierre Giraud, jurait avoir vu un fadet prĂšs de son puits. Il rentrait tard, la brume Ă©tait Ă©paisse, et lĂ , une silhouette minuscule, « pas plus haute quâun chien », lui aurait lancĂ© un caillou avant de disparaĂźtre avec un rire.
Le lendemain, son seau Ă©tait plein de poissons frais, alors que le puits nâen avait jamais eu.
Les voisins ont ri, mais Pierre, lui, a laissĂ© un bol de lait prĂšs du puits jusquâĂ sa mort.
Vrai ou pas, lâhistoire a marquĂ© les mĂ©moires.
Toujours lĂ , ou presque
Aujourdâhui, les fadets, câest plus vraiment la star des discussions. La modernitĂ© les a relĂ©guĂ©s aux contes pour gosses ou aux soirĂ©es dâHalloween.
Pourtant, dans les coins reculĂ©s, certains vieux te diront quâils les sentent encore : un outil dĂ©placĂ©, un murmure dans le vent.
Les croyances sâeffacent, mais le frisson, lui, reste.
Les fadets, câest pas juste une lĂ©gende, câest une maniĂšre de voir le monde, une poĂ©sie qui dit que la nature garde ses mystĂšres, mĂȘme quand on croit tout savoir.